Vivre le patrimoine autrement : zoom sur les formats innovants qui font bouger la valorisation locale

Le téléphone portable, compagnon de toutes nos balades, devient désormais une véritable passerelle vers le passé. Un format qui explose ? Les applications de visites interactives géolocalisées, souvent gratuites et accessibles depuis son smartphone.

• Réalité augmentée : Des monuments revivent sous nos yeux grâce à la réalité augmentée. On scanne une façade de l’hôtel des Ducs et voici, via son écran, l’ancien hospice de Beaune qui se reconstruit en 3D au fil des siècles (exemple : Carnavalet en Paris propose une expérience similaire, tout comme les Villes et Pays d'Art et d'Histoire en Bourgogne).
• Jeux de piste et chasses au trésor numériques : Les enfants (et les grands !) adorent. Les énigmes guident les visiteurs d’un point à un autre, les invitant à lever le nez sur les détails cachés et à résoudre les mystères de leur ville (le concept de Trésors de Bourgogne en est un bel exemple, mêlant patrimoine et ludique).

Selon une étude du Ministère de la Culture (2022), 54 % des visiteurs de sites patrimoniaux disent préférer aujourd’hui une visite avec contenu multimédia personnalisé, plutôt qu’une visite guidée traditionnelle.

Derrière les portes closes, il y a des histoires à raconter. Les podcasts produisent de petits miracles : ils libèrent la voix des anciens, remettent de l’humain où on ne l’attendait pas et font voyager tout en restant assis chez soi ou en déambulant dans les rues.

• Les “baladodiffusions” in situ : On les écoute en cheminant d’un site à l’autre, pour découvrir la vie d’un vigneron du 18e, l’origine du nom d’une ruelle ou les anecdotes sur les vieilles pierres. La série “Raconte-moi Beaune” a boosté la fréquentation de certains lieux selon l’Office de Tourisme (près de 30 % de l’écoute se fait sur place).
• Table ronde et témoignages : Sur le modèle de “Patrimoine(s) en Bourgogne” (France Bleu Bourgogne), des spécialistes, habitants et jeunes se croisent autour d’un micro, apportant un regard contemporain sur des monuments séculaires.

L’audio est un format souple et accessible qui séduit désormais les collectivités (41 % des offices de tourisme en France ont produit ou diffusé au moins un podcast sur le patrimoine en 2023 — source : ADN Tourisme).

Regarder un château, c’est bien. Le traverser dans la peau d’un enquêteur chargé de découvrir le secret du seigneur, c’est mieux ! Les escape games patrimoniaux font carton plein, notamment auprès des familles, scolaires et entreprises venues souder les équipes.

• Scénarisation sur-mesure : Les énigmes s’inspirent d’événements réels ou de personnages marquants du territoire. Le “Mystère de l’Hôtel-Dieu” à Beaune affiche complet à chaque saison, obligeant parfois à réserver des mois à l’avance.
• Mobilisation de tous les sens : Manipulation d’objets d’époque, fouille dans les archives, observations minutieuses… Autant de mécanismes qui changent la relation au lieu patrimonial. Selon l’agence Escape Game France, ces formats “expérience” font grimper de 20 à 30 % la fréquentation en basse saison pour certains sites.

Peindre sur un vieux mur ? Oui, mais pas n’importe comment ! Les fresques, installations in situ et parcours d’art urbain se multiplient, réconciliant parfois patrimoine architectural et cultures actuelles.

• Fresques monumentales : À Dijon, le parcours “Le Mur” permet à des street-artistes internationaux de s’exprimer sur des pignons d’immeubles, avec des œuvres inspirées de l’histoire locale. À Beaune, certaines ruelles ont déjà accueilli des interventions temporaires lors du festival “Côte à Côte”.
• Parcours pérennes ou éphémères : Les collectivités créent des itinéraires, souvent connectés à une application, pour guider les visiteurs d’œuvre en œuvre et leur raconter le quartier autrement (exemple national “Street Art Cities”).

D’après le rapport Observatoire du Street Art (2023), près de 62 % des visiteurs de parcours urbains disent que cela les a “rendus fiers de leur territoire”.

Parfois, un zeste de théâtre suffit à donner vie à tout un pan d’histoire. Les visites théâtralisées ou immersives font la promesse de sortir du récit “descendant” pour faire participer le public, l’émouvoir et l’impliquer.

• Comédiens en costume : Ils retracent le quotidien des habitants d’antan, revisitent avec humour ou émotion la construction des remparts, la vie à l’Hôtel-Dieu et les secrets des confréries.
• Participation du public : Certains formats proposent de faire incarner un personnage historique ou de choisir la suite de l’histoire (pratique, déjà vue à Semur-en-Auxois avec la compagnie A Houleots).

Le spectacle vivant fait désormais partie intégrante de l’offre patrimoniale : 78 % des sites majeurs en France ont proposé au moins un événement à composante théâtrale en 2023 (étude Sites&Cités remarquables, 2024).

Oublier la nostalgie, s’inscrire dans son époque : nombre d’artistes (plasticiens, photographes, designers, musiciens) relisent à leur manière l’héritage local.

• Installations lumineuses : Pendant la Nuit des Musées ou les grandes fêtes du vin, des mapped shows illuminent façades et monuments, racontant l’histoire autrement (voir la Fête des Lumières à Lyon ou le mapping sur les Hospices de Beaune).
• Projet participatif : Des habitants s’associent à des artistes pour co-créer une œuvre qui restera dans l’espace public — comme la fresque “Mémoire de vignerons” à Meursault.

La création actuelle fait émerger de nouveaux usages du patrimoine, loin du simple décor figé. C’est aussi une façon d’attirer les jeunes publics, souvent en quête de sens et d’expériences partagées.

À l’heure où les musées et sites historiques cherchent toujours à toucher des publics plus larges et plus variés, la valorisation du patrimoine se réinvente sans cesse. Les tendances qui montent :

• Rendre le public acteur (jeux, théâtre, création collaborative)
• Miser sur l’émotion et le récit vivant, pas juste la transmission de savoirs
• Penser “hors les murs” : valoriser les quartiers, les petits villages, la ruralité autant que les châteaux emblématiques
• Oser le numérique, non comme gadget, mais comme amplificateur d’expériences humaines

Le Pays Beaunois n’a pas à rougir : toutes ces innovations existent déjà ou sont en gestation sur le territoire, portées par des équipes enthousiastes et un public qui ne cesse de se renouveler. Si le patrimoine a mille visages, c’est bien par la diversité des formats qu’il parvient à toucher, surprendre, faire aimer… et donner toujours envie de revenir s’y plonger !