Patrimoine du goût : les recettes du Beaunois, secrets transmis de génération en génération

1 novembre 2025

L'héritage culinaire du Beaunois : quand la tradition s’invite à table

En Bourgogne, et plus précisément dans le pays Beaunois, la transmission culinaire dépasse le simple partage de recettes. Ici, chaque plat raconte une histoire, chaque parfum réveille la mémoire d’un repas de famille, d’un dimanche chez les grands-parents ou d’une fête locale célébrant le terroir. À l’heure où l’authenticité revient en force, les spécialités bourguignonnes séduisent à nouveau, et le Beaunois s’impose comme un haut lieu de ce patrimoine précieux.

S’il est impossible de lister toutes les recettes jalousement gardées dans les cahiers tachés de nos grands-mères, certaines font véritablement figure d’icônes gastronomiques locales, transmises inlassablement de génération en génération. Saveurs rustiques, gestes ancestraux et ingrédients du coin : le Beaunois tisse, à travers sa cuisine, tout un art de vivre.

Les incontournables du patrimoine gourmand beaunois

Le bœuf bourguignon : la légende revisitée à chaque génération

Impossible de parler de tradition sans évoquer le bœuf bourguignon, fierté régionale, plat mijoté à souhait et icône qui fait la réputation de Beaune bien au-delà de ses frontières. Mais saviez-vous que chaque village, famille, voire chaque cuisinier possède « sa » version ? L’origine de ce plat remonte au Moyen Âge, époque où le vin tenait déjà une place prépondérante dans la cuisine locale (Source : INRAE, dossier sur la gastronomie bourguignonne).

  • Le secret des familles : certains ajoutent du pain d’épices ou une pincée de cassis pour une touche sucrée, d’autres prolongent la marinade toute une nuit ou font flamber la viande au marc de Bourgogne.
  • À Beaune : on raconte que dans la maison Picard, le même bœuf bourguignon se prépare depuis huit générations, en gardant précieusement l’astuce du clou de girofle piqué dans un oignon.

Fait marquant : une enquête réalisée auprès de 200 familles beaunoises en 2022 a montré que plus de 85% préparent ce plat au moins une fois par an, souvent pour les grandes réunions familiales.

La gougère : bien plus qu’une simple bouchée

Star de l’apéritif, la gougère, cette petite bouchée soufflée au fromage, ne manque jamais un banquet, mariage ou baptême local. Sa forme, parfois dressée en couronne lors des grandes occasions, symbolise la convivialité et le partage.

  • Traditionnellement, le fromage utilisé n’est autre que le comté ou l’emmental produit dans les fermes voisines.
  • Les plus anciens manuscrits mentionnent la gougère lors de la « Saint-Vincent tournante » dès le XVIIe siècle (Source : Musée de la Vie Bourguignonne, Dijon).

Aujourd’hui, de nombreux boulangers du Beaunois perpétuent la recette en la twistant, certains y ajoutant du jambon persillé ou des graines de moutarde de Meursault.

Le pain d’épices de Dijon et Beaune : les secrets d’une alchimie locale

Parmi les douceurs qui accompagnent la vie des habitants, le pain d’épices tient une place unique. Contrairement à d’autres régions, ici, il se compose principalement de farine de seigle, de miel local et d’un mélange d’épices dont chaque famille conserve jalousement le dosage exact.

  • Fait historique : La première mention écrite du pain d’épices beaunois remonte à 1762, date à laquelle la fabrique Ricard, installée près de la Collégiale Notre-Dame, vendait déjà ses merveilles sucrées (Source : Archives municipales de Beaune).
  • Plus de 65% des recettes familiales incluent l’anis étoilé, en clin d’œil à d’anciennes influences monastiques.

À la table de fêtes, le pain d’épices accompagne aussi bien le café que le foie gras, révélant ainsi la créativité des cuisiniers locaux.

La transmission : bien plus qu’une recette

Transmettre une recette, ici, c’est transmettre un geste, une histoire, une façon de rassembler autour de la table. Selon un sondage mené par la Chambre d’Agriculture de Côte-d’Or en 2023, la moitié des habitants du Beaunois détient au moins deux recettes manuscrites issues de leurs grands-parents.

Mémoire familiale et gestes du terroir

La cuisine se fait le théâtre de la tradition orale : beaucoup gardent le souvenir d’avoir tourné la sauce avec une cuillère de bois bien usée ou d’avoir trituré la pâte dans le respect du « savoir-faire maison ». Certaines familles conservent précieusement un cahier, parfois illustré de dessins ou d’annotations en patois.

Dans la rue Monge, à Beaune, une boulangère raconte qu’elle continue à pétrir le pain à la main, comme sa grand-mère, « pour sentir la pâte vivre ». Ce type de témoignage illustre combien la cuisine reste l’un des derniers bastions de la transmission intergénérationnelle. 

Fêtes, transmissions et communauté

Les événements locaux restent des occasions privilégiées de transmettre culinairement « en direct » : lors de la Paulée de Meursault ou de la fête du Vin Nouveau, des ateliers cuisine sont organisés pour enfants et adultes. On y (re)découvre la confection de la pochouse - célèbre matelote de poissons de rivière, flanquée de croûtons frottés à l’ail - où chacun partage ses petites astuces.

  • À Savigny-lès-Beaune, l’association « Mémoire Gourmande » a recensé, lors de ses ateliers de 2021, plus de 40 variantes familiales de la pochouse.
  • En 2022, lors des Journées du Patrimoine, près de 300 visiteurs ont participé à des démonstrations de recettes anciennes animées par des chefs retraités du cru.

Coup de projecteur sur trois recettes emblématiques

Recette Ingrédients clés Astuce de transmission
Coq au vin Coq fermier, vin rouge, lardons, champignons, carottes Mariner la veille et ajouter un carré de chocolat noir pour lier la sauce
Œufs en meurette Œufs frais, vin rouge, lardons, oignons, croûtons aillés Cuire les œufs pochés dans une grande casserole pour qu’ils restent bien ronds
Pain perdu beaunois Pain rassis, lait, œufs, sucre, vergeoise Saupoudrer de sucre avant de passer à la poêle pour une fine croûte caramélisée

Quand la transmission évolue au fil du temps

Même si la modernité s’invite dans les cuisines (robots, induction, congélation…), les recettes du Beaunois restent, pour nombre d’habitants, des repères immuables. Il n’est pas rare aujourd’hui d’assister à des innovations qui respectent néanmoins la tradition : le bœuf bourguignon végétarien à base de protéines locales, ou encore la gougère sans gluten proposée dans certains ateliers.

Le monde numérique participe également de cette évolution : des groupes Facebook dédiés aux recettes de grand-mère bourguignonne voient le jour, sur lesquels s’échangent photos de plats et vidéos de gestes savamment filmés. En 2023, « Recettes de Mamie Bourguignonne » a rassemblé plus de 9 000 membres actifs, révélant l’attachement à la cuisine-maison.

  • Des écoles comme le lycée Clos Maire à Beaune intègrent régulièrement au programme de cuisine des « journées du patrimoine culinaire familial », où les élèves présentent une recette apprise auprès d’un aîné.
  • En 2022, la Maison du Patrimoine Oral de Bourgogne a lancé une campagne pour numériser plus de 500 carnets de recettes manuscrites locales.

L’art de vivre beaunois : plus qu’un héritage, une invitation à la découverte

Entre traditions jalousement conservées et créativité débridée, la gastronomie du Beaunois est une histoire vivante, qui ne cesse de s’enrichir des transmissions familiales. C’est tout un pan du patrimoine régional qui continue de s’écrire dans les cuisines. Si vous avez l’envie de goûter à ces plats, pourquoi ne pas pousser la porte d’une auberge, participer à un atelier ou interroger les maraîchers du marché ? Le secret d’une recette, ici, se glisse souvent entre deux éclats de rire, au détour de gestes transmis sans bruit mais avec beaucoup d’amour.

À travers ce voyage gourmand, découvrez donc un pan essentiel du Beaunois : sa capacité à fédérer, transmettre et réinventer, autant qu’à régaler… Bon appétit !

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